Hommage à la quête perpétuelle d’un improbable équilibre

NON à l’Appel des sirènes !

La faiblesse de la volonté (l’akrasie) conduit souvent à vouloir le meilleur et pourtant faire le pire. Comment donc s’assurer de rester en accord avec soi-même ?

Il convient certes de respecter un principe d’humanité et de non-cruauté, équilibrant devoir et pouvoir. Car on ne doit que ce que l’on peut, et il serait inhumain d’exiger l’impossible comme devoir, et tout autant d’interdire le nécessaire (ce qui ne peut pas ne pas être).

Mais il est néanmoins possible de renforcer le lien entre pensée et action : plutôt que de compter sur ses propres forces, nécessairement limitées et soumises à cette « akrasie », se donner des contrôles extérieurs à soi qui vous rappelleront le moment venu vos promesses et votre devoir (choisis et assumés par vous antérieurement).

On peut ainsi augmenter nos chances de rester fidèles et ce que l’on croît, c’est-à-dire accorder notre action à notre pensée, et ainsi préserver notre intégrité même lorsque les sirènes appellent. Pour cela, il faut compter sur l’Ami réel, le Vrai, car l’Ami est là pour ça ! N’est-il pas l’alter ego, le meilleur de nous-mêmes, qui nous rappelle au bon moment le désir de nos coeurs, nos promesses faites à nous-mêmes et notre devoir envers nous-mêmes de les accomplir ?

Livrés à nous mêmes, nos forces sont plus faibles que nous ne l’imaginons, mais heureusement l’ami est là pour nous soustraire à la fascination et nous détourner du chant des sirènes.

Allons-nous renoncer à nos engagements envers nous-mêmes et nos semblables, notre planète ? Allons-nous oublier notre promesse (donc notre devoir) d’unité ? L’union est plus forte que la division. La devise fondatrice « Liberté, égalité et fraternité » peut aussi agir comme un rappel.

Voilà pourquoi, à des moments critiques, nous rappeler les uns aux autres nos choix et nos combats de toute une vie reste le meilleur service que nous puissions rendre à la vie et à nous-mêmes.

Allons encore et toujours vers ce qui nous unit.
À vos consciences, les Amis ! (Aux urnes, citoyens !)

Humainement,
t.

Peintre de la Sirène (attribué au)
Ulysse et les sirènes (détail)
stamnos à figures rouges
Ve siècle av. J.-C.
Londres, British Museum

L’humain à venir

Himalaya

Hommage au juste milieu (aussi connu comme Force d’unification)

Quand l’homme vient au monde, il est souple et faible ; quand il meurt, il est raide et fort.
Quand les arbres et les plantes naissent, ils sont souples et tendres; quand ils meurent, ils sont secs et arides.
La raideur et la force sont les compagnes de la mort ; la souplesse et la faiblesse sont les compagnes de la vie.

 

J’ai l’impression que la grande Révolution des cœurs et des esprits, souhaitée depuis tellement de temps, se pointe à l’horizon. Combien de fois ai-je cheminé vers ce même horizon « nouveau » ! On ne compte plus ses appellations contrôlées : Communisme, Contre Culture, Mai 68, mouvement de libération de tout et de rien, et j’en passe… Mais chaque fois qu’on croyait s’approcher de l’horizon, il s’éloignait ! Et c’est ainsi que des générations entières se sont detournées de l’essence même de leurs rêves, de leurs aspirations. Finalement, quelle désillusion !

Mais qu’elle est salutaire, cette désillusion qui dessille nos yeux.

Pour celle que j’étais alors, feu, ardente et impétueuse, la « voie du milieu » était celle des tièdes, des timorés. Je les aimais bien (de loin), mais ne souhaitais surtout pas leur ressembler. Préjugé !

Ah, les apparences ! Qu’il a raison celui qui dit que ce n’est pas des apparences qu’il faut se méfier, mais du regard qu’on porte sur elles !

Aujourd’hui c’est une évidence qu’il est en tout un juste milieu, comme dit Horace, et que c’est cette voie du juste milieu qui nous conduira vers l’unification et la guérison de nous-mêmes et de notre planète ! Une autre évidence : elle n’est pas tiède mais chaleureuse, humaine, printanière, vivifiante !

Et que dit la Voie du Milieu ?

Elle considère la délicatesse, la souplesse, la faiblesse et la tendresse comme des valeurs fondamentales. Depuis la plus haute antiquité, toutes les traditions ont enseigné le rejet des extrêmes. Il est dit : Le Parfait a évité ces deux extrêmes ; il a trouvé le sentier du Milieu qui ouvre les yeux, engendre la connaissance et mène à la paix, la clairvoyance, l’Illumination.

Le Tao, voie du millieu par excellence, s’appuie sur ce symbole :

Ying Yang

Nommé « le Symbole du Tout », il est divisé en deux parties égales : le Yin et le Yang. Et il symbolise non pas deux, mais trois forces.
Le Yin, ou élément doux, calme, passif, négatif, sombre.
Le Yang, élément fort, agressif, actif, positif, clair.
Et entre ces deux forces, la « Voie du Milieu », ou « Voie du sage », est la résultante de l’énergie du + et du -, le neutre entre le positif et le négatif…

Dans ce sens, le Tao symbolise la réunification de l’homme, l’unification des forces. La présence du point blanc dans la partie noire, et du point noir dans la partie blanche, montre que chaque-un des hommes a en lui un principe féminin et un principe masculin.

Bref, ce symbole nous signifie que, homme ou femme, notre comportement doit s’adapter sans cesse – à l’instar de la Vie ! – à la situation. Dans certains cas, il faut être soit « homme » – c’est-à-dire fort, agressif, compétitif (Yang) –, soit « femme » : doux, calme, coopératif (Yin).
Le tracé sinusoïdal traversant le Tao verticalement et qu’on appelle « Voie du Milieu », est le symbole de l’adaptation à la situation. Il est l’élément le plus important du Tao : la « Troisième Force.

Donc celui qui s’adapte au moment, au lieu et aux gens, est l’homme du milieu, l’homme du moment présent, le conciliateur, l’unificateur, le sage ! Et comme je l’ai dit plus haut, toutes les traditions, sans exception (laïques ou religieuses), n’ont d’autre but que l’avénement de cet Humain-à-Venir ! Celui qui nous menera vers ce qui nous unit, celui que nous conseillera non pas de renier nos divergences, mais de dialoguer. Ensemble, tous ensemble pour trouver une solution à ce qui nous divise…

Et cet homme à venir, celui que nous attendons tous, cet homme-là nous attend depuis toujours. Du dedans du dedans de nous-même il nous appelle ! Il est l’unificateur, le conciliateur, l’humain. Notre être Réel en Réalité et en Vérité !

Or, entendre l’appel, c’est y répondre « Me Voici ! »

A nous de franchir cette presque infinie distance qui nous sépare du meilleur de nous-même. Sommes-nous prêts à répondre ? Le voulons-nous ?

Entre le Oui et le Non, la réconciliation. Entre les deux, non pas la tiédeur, mais l’infinie tendresse. La beauté, la miséricorde du juste milieu ! La Paix !

t.

Notes:
Samyutta-Nikâya – Les discours groupés du Boudha
Lao Tseu ,Tao-te-King Ed. Librio
Les soufis et l’ésotérisme, Payot, Paris

Évangile selon Matthieu – Le sermon sur la montagne (chap. 5 à 7)

N’importe quoi…

Quand je dis que je ne sais Rien, je ne veux pas simplement dire que « je » ne sais Rien par rapport à D.ieu, la place de l’homme dans l’univers, le monde, moi-même, la Création, la Relativité Restreinte… Non ! Ce que je veux signifier, c’est que « je » ne sais RIEN à propos de tout.

Et ceci doit être pris littéralement: « Je » ne sais rien de rien de tout !

Et je vais peut-être aggraver mon cas, en affirmant que « je » ne souhaite pas non plus savoir… Être suffit à l’être, être là au gré du souffle, se laisser emporter par le vent, n’importe quand, n’importe où… Et ainsi, sans comment ni pourquoi, poursuivre la route de la Vie, le front serein, sans honte de raconter cette ignorance foncière, ni l’état de profonde idiotie dans lequel « je suis » est plongé. Ah, la Paix qui arrive quand « je » sais que « je » ne sais pas et que « je » ne souhaite pas savoir…

Est-ce parce que « j’ai su » ? Comment le saurais-je, puisque « je » ne sais rien ? « Je suis » est dans l’instant, fille de l’instant, et comme « je » suis trop idiote pour penser, et a fortiori pour réfléchir – ô merveille ! – tout est redevenu simple, parce que spontané. « Je » suis là où « je » suis ! Et comme le non savoir ne peut pas du tout être exprimé, par le simple fait qu’il n’y a Rien à dire, il n’y a Rien à comprendre non plus…
Ce ne sont là que divagations et vagabondages issues d’une fol’ dualitude.

t.

Je me contredis ?
Très bien, alors…
Je me contredis ;
Je suis vaste, et je contiens des multitudes.

Walt Whitman

Comète Hale-Bopp – Nasa

Le chemin du vent ardent

Vivre ce n’est pas un discours, vivre c’est prendre le chemin du vent. Or on ne prend le chemin du vent qu’en dansant, car c’est en dansant qu’on arrive à la nudité qui est le sauf-conduit pour la vraie vie ! Au-delà, il nous faut nous laisser guider par le son de la flûte du roseau qui, comme nous le confie Rumi, émet un son de feu et non de vent. L’ardent désir de la vraie vie nous fera in fine prendre feu et ainsi déchirer les voiles qui nous ont tenu éloignés de l’Ami, le Vrai, le Réel ! Le son de la flûte, son feu, remonte si loin en arrière dans le temps qu’il finit par transformer le temps en espace, et l’espace en lumière, et la lumière en absolue transparence.
Ecoute donc, écoute la flûte de roseau et sa plainte, car en même temps qu’elle chante la séparation, elle est le son, l’échelle musicale qui conduit à l’union…

t.

Photo:
Deux amas d’étoiles , M46 et M47, dans la constellation de la Poupe, dans Argo

Hommage aux Alpilles !

Les Vacances… mais pourquoi faire?

Il y a vacances et vacances, chacun concevant la liberté et la disponibilité qui les accompagne d’après ce qu’il est ! Je ne voudrais pas analyser ici les attitudes de nos frères humains en vacances : il n’est pas en accord avec la sensibilité de ce blog de faire des analyses socio-psychologiques, et cela risquerait fort de gâcher le début des vacances, justement !

Pour celle qui écrit, la période des vacances ne change pas les priorités et ne modifie rien, à une nuance près : le lieu géographique. Si vacance signifie liberté et disponibilité à la vie, alors je suis constamment en vacances. Il ne m’a d’ailleurs jamais effleuré que changer de lieu puisse en quoi que ce soit changer l’être. Où que l’on aille, on y va avec soi-même ! Autant en être informé 😉

Alors, pourquoi se déplacer dans l’espace vers un « autre » lieu géographique, surtout lorsque l’on sait qu’il n’y a qu’un seul lieu, celui de l’Être ? C’est que dans son infinitude, l’Être a ménagé des espaces au cœur de l’espace, des environnements singuliers qui, comme les notes d’une mélodie unique, déclinent toujours le même thème mais s’accordent avec douceur à la respiration harmonique de chaque âme.

On trouve ainsi parfois des lieux vibrant de telle manière qu’ils sont comme des prolongements de nous-mêmes. Comme s’ils contenaient en eux des fragments, des versets de notre poème intime. Des phrases frémissantes de notre musique intérieure, inachevée ici, accomplie là…

La Toscane et la Provence, autrefois une seule et même province, font partie de ces lieux qui reflètent le mieux la complétude de « mon » âme. L’une comme l’autre – mais l’une est l’autre ! – expriment autant qu’il est possible cette quasi insoutenable Bienveillance de l’Être ! Le paysage y est si dépouillé, si dépourvu de tout artifice, si contenu dans sa propre discrétion qu’il ne fait plus aucun obstacle à l’espace, à la sublime bonté du vide !

Il est comme une prière de la Terre. Non pas une prière de demande, mais une prière de gratitude, élégante et silencieuse ! Moins vastes que la Toscane, secrètes au cœur de La Provence, les Alpilles accueillent la miséricorde divine parmi ses champs compatissants de lavande, son thym, son romarin revêtant humblement le vide de subtilités parfumées, comme l’offrande reconnaissante de la Terre au Ciel. Et que dire des cyprès qui, çà et là, émergent solitaires de la douce courbe des montagnes ? Ou des champs d’oliviers sacrés, ni d’Orient ni d’Occident, d’où jaillit la lumière de l’âme…

Dans la vallée des Baux de Provence, les visiteurs que l’on croise ne sont pas tous aussi discrets que les vrais amoureux savent l’être. C’est la renommée touristique du « plus beau village de France » qui les attire souvent. Mais qu’importe, après tout, ils ne font que passer…

Les pèlerins du silence, qui n’aspirent qu’à demeurer dans l’émouvante intimitée de l’être et des choses, sont toujours, dans cette terre de Provence, dans cet enclos du Paradis, invisibles et présents à la fois. Le temps passe, les civilisations naissent et meurent, mais ce sont toujours les mêmes amoureux qui habitent cette Terre de l’Âme.

Inclinaison amoureuse, gratitude infinie pour cette vallée et tous ses amants secrets et discrets, mais néanmoins transis d’Amour !

Et puisse leur bienveillance pardonner à cette amante, un brin trop bavarde…

t.

Alpilles hiver et été – Photos de Natacha Quester-Séméon