Om Mani Padme Aum, Dalaï Lama

Aussi longtemps que durera l’espace, Aussi longtemps que dureront les êtres sensibles, Puissé-je moi aussi demeurer Afin de dissiper les souffrances du monde !


Dalaï,

Tu voyages au gré des vents de D.ieu, et en te voyant j’ai eu l’impression que D.ieu n’était qu’un nom pour le chemin des vents de la compassion et de la Miséricorde. Tu incarnes une autre réalité, éternelle et impérissable, cachée derrière l’apparence, cachée derrière l’apparent gloria mundis ! Tu invites au désarmement dans un monde de guerres, au désencombrement dans un monde rempli de lui-même. Tu invites à la nudité du visage dans un monde de masques, à la tendresse dans un monde où seule la force a valeur de dissuasion. Tu parles le langage de la Paix et tu n’es pas entendu : comment pourrait-il en être autrement… dans ce monde ? Tu dois être triste, infiniment triste et seul, car dans ce monde perdu dans les nuages de l’irréel, les jeux (de la bourse) et le cirque (pour empêcher que la pensée altruiste n’éclose) sont les valeurs quasi absolues de ce monde éphémère, irréel, flottant…

Apparemment, c’est ainsi. Néanmoins dans le monde réel, celui de l’essence et de l’être vrai, c’est toi qui dit le vrai, ce sont tes paroles qui témoignent des valeurs éternelles.
Dans le monde des mirages et des rêves de puissance, le gouvernement chinois fait figure de vainqueur, mais face à la vraie réalité, celle qui seule compte, il a déjà perdu. Sinon comment pourrait-il penser un seul instant que l’on puisse emprisonner le vent, l’esprit, la pensée et le vide ?

Et tandis, que toi et les tiens chevauchent le vent, l’armée chinoise « rampe » sur terre.
Quoi qu’il advienne, depuis la première aube de la conscience, toi et les « tiens », toi et tes semblables, portant des appellations et des figures si différentes que les guerriers de l’ombre ont bien du mal à les reconnaître, oui, quoi qu’il advienne dans ce monde des mirages flottants, vous êtes vainqueurs. Car comme il a été dit, mon frère, l’Amour, la compassion et la Miséricorde sont les triomphateurs de tous les obstacles !

Et comme disent nos amis, entendre l’appel c’est y répondre,
Me Voici, à ton service.
t.aka n’importe qui

Note Bene:
« C’est pourquoi j’ai dit, et je répète avec douceur : ne soyons pas plus tibétains que le dalaï lama », mais soyons avec lui, à son service… au service du dialogue, de la dignité de tous les humains, de la PAIX !

D’ailleurs et de partout

Dans l’esprit de l’homme normalisé, l’humanité se fonde sur la raison, l’intérêt, l’utilité, la compétition, la possession, l’ordre… sur tout ce que l’on voudra, mais jamais sur la poésie ! Pour lui, la poésie sera toujours un excès de sentimentalité, une inaptitude au réel, une demeure mensongère pour les fous… L’homme normalisé refuse tout dépassement, toute transcendance, car il vit dans la croyance en la toute puissance de l’entropie, de la mort ! Misanthrope et destructeur, il a insinué le doute partout, désespérant ainsi le monde et se désespérant lui-même. Pour nous en sortir, il nous faut une immense énergie, une puissance inouïe permettant à cette énergie de vie et de bienveillance, à cette pure Bonté qui est la vie, de jaillir en poésie et ainsi de nous faire renaître ou simplement naître au monde, à la vraie humanité ! Sortir d’un monde où « la vraie vie est absente », du « royaume de l’être mort », pour accéder au « royaume de la vie ».

Ce que tu as appelé monde, dit Zarathoustra, il faut commencer par le créer – ta raison, ton imagination, ta volonté, ton amour, doivent devenir ce monde.
Or le poète ne quitte pas le monde, contrairement au moine (même s’ils ont de aspirations communes) : il plonge dans le monde. C’est à partir de ses expériences de la terre et des hommes qu’il construit son propre monde, plus riche, plus intense, plus authentique ! Le monde ne signifie pas pour le poète la « réalité objective » : il sait le monde fait d’événements de pure énergie que la pensée de l’homme interprète comme des objets figés. Le poète, l’être humain, cherche des réalités plus subtiles, des choses derrières les choses…

Le poète se trouve sur la Terre dans une situation de grande perplexité, conscient de la profondeur abyssale et de l’étendue infinie de « son » être. Il ne se nomme pas. Pas encore… Il se sait vaste car « il contient des multitudes ». Et c’est ici, dans ce seuil de tous les dangers, ici seulement, que commence la poésie.
Dans l’esprit de l’homme normalisé, le « monde » signifie le modèle fixe de perceptions auquel il s’adapte plus au moins pathologiquement. Le poète, lui, vit et pense dans un « monde » toujours inachevé, en perpétuelle création, où tout est vivant, vibrant, frémissant, où il n’y a que des présences !


L’unique Trait du Pinceau – Cheminements

Quand bien même le pinceau ne serait plus pinceau… il ne saurait peindre le dehors. Quel dehors ?

Pourtant, puisque ici la vraie vie est absente, il faut « s’en aller », « sortir »…

Ayant traversé les plaines arides de l’attente, au-delà de l’espoir et du désespoir, accepter de s’échouer sur rivage de la solitude, de vivre au lieu de simplement exister.

Que de souffrances, que d’aliénations dans les paysages mentaux d’un monde apoétique, dans une existence mentale errante et aberrante.

S’en aller, sortir…

S’en aller, sortir… de quoi ?
De la pesanteur de la malveillance, de la médiocrité nihiliste érigée en modèle, de l’étouffement de la pensé linéaire…
De la perversité qui nous fait à la fois assassins et bourreaux de nous-mêmes. De notre impuissance à assumer la bonté, l’innocence, à assumer l’humain – celui qui Est !

Sortir, donc… pour aller vers quoi ? Et comment ?

Il s’agit d’abord de s’assouplir, de se spatialiser, de s’universaliser. Sortir de la platitude et prendre l’envol vers l’aurore, vers la limpidité poétique qui nous fait voir, comme en une perception stellaire, l’émouvante simplicité de l’être, la rencontre du Seul avec le Seul ! Là où l’idée Déliée se retrouve dénudée et infiniment Simple, Forme et sans Forme, Pleine et Vide, indifférenciée et indéterminée, affranchie… Libre, libre, libre ! Bonne et Belle !

Sortir, donc, pour aller vers RIEN. Se laisser emporter par le vent solaire, qui souffle n’importe où dans ce lieu qui est un non-où…
Seul(e) à Seul(e) au milieu du non-où infini, l’espace se dévisage soi-même.
Un grand, un immense silence règne.
Soudain, des chuchotements dans cette immobilité perçue comme l’apogée d’une infinité de mouvements, de tous les mouvements erratiques accomplis hors de soi-même.

Et que dit le chuchotement du vent, du silence et du vide ?

L’essence même (de l’homme) est poétique, et nul ne peut vivre humainement sans la Poésie !

t, aka n’importe qui.

Le long du chemin, en maints lieux traversés :
Traces de sabots sur le tapis de mousse…
De blancs nuages entourent l’îlot paisible ;
Derrière les herbes folles, une porte oisive.
Comtempler, après la pluie, la couleur des pins
Puis atteindre, au delà du mont, la source.
Une fleur dans l’eau éveille l’esprit du Chan.
Face à face : déjà hors de parole.

Liu Changqing, 8ème siècle

@Dessins de Shitao (moine Citrouille Amère)