MATERIA LUCIDA
Même si j’ai l’intime conviction que, dans le dos de l’homme, il y a un emplacement pour des ailes, une fois arrivés au sommet de la montagne, il nous faut énormément d’audace pour nous élancer dans le vide, et transformer la terreur ressentie en un bond vers la lumière.
Je tiens à dire que cette audace n’est pas une expression d’arrogance, ni de mépris de quoi que ce soit. Elle prend racine dans l’empreinte de l’évolution qui est gravée en caractère de flammes dans le cœur des amoureux de la plus haute Lumière ! Et c’est cet ardent désir de la sublime bonté, qui ose, qui nous donne les ailes nous permettant de faire le saut dans l’inconnu, dans le vide, à la recherche de la totalité de nous-mêmes.
Mais, comme dit un dicton Afghan, nul ne doit être de force traîné au ciel !
Mais alors pourquoi tant insister sur la noblesse et sur l’audace, et refuser si fortement la médiocrité ?
Parce que ceux qui cherchent à s’élever savent que l’élévation (l’évolution) ne peut prendre origine que dans une conscience libérée de la sur-estimation (la vanité, l’orgueil, l’égoïsme) et de la sous-estimation de soi-même (l’apitoiement, la servilité, la complaisance dans la médiocrité). L’audace consiste à refuser et ceci et cela, car ces deux-là, qui en fait ne font qu’un, abaissent l’infini et limitent l’homme.
Ceux qui cherchent à s’élever savent qu’au regard des autres ils ne sont pas conformes, qu’ils sont mis en marge, et qu’ils doivent oser et assumer cela.
Ceux qui cherchent à s’élever savent que leur occupation essentielle doit consister à ne sombrer ni dans la copie conforme, ni dans les ténèbres de la banalité, qui préfère l’attente à l’élan. Ils doivent assumer leur « excentricité » et ils le savent.
Dans l’attentisme, par exemple, il y a toujours de l’immobilité, de l’immobilisme, tandis que dans l’élan, il y a toujours une envolée vers le devenir.
Mais cette recherche d’anoblissement, d’élévation de soi, doit avoir pour but, l’ennoblissement de l’espèce humaine dans sa totalité !
En vérité, tout acte de vie doit être pénétré d’un pur élan flamboyant d’amour. Et chaque-un sait qu’il faut oser l’amour, cet Amour dépourvu d’égoïsme (surtout dans ce monde mercantile, asservi à l’intérêt personnel et immédiat), cette pure gratuité dont parlent les sages et les prophètes, les fous et les poètes.
Donc, il nous faut de l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace, afin que, tel un sculpteur, nous puissions faire jaillir de cette matière chaotique qui est le monde des apparences, les étincelles du feu de la vraie vie qui, en s’enflammant, nous rendront notre totalité lumineuse, et de facto, notre humanité, notre beauté, nos ailes de Liberté, nos ailes d’Amour !
Tous ensemble, tous ensemble…
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t.0
*gravure John Martin