
C’est comme si la lumière éclaboussait de feu les feuilles, pensent les arbres en leur immobile splendeur…
Saisie par l’inconnu, absorbée dans l’inconnu, il m’a fallu tout recommencer. À partir de zéro ! Vagabonde de la vacuité, je suis cendre brûlante, couleur d’opale, plongée dans un bienheureux nuage d’inconnaissance. Je ne sais rien, je découvre tout… J’apprends !
Néanmoins, le regard que je porte, je l’apporte de profondeurs presque jamais visitées. Il est vif, il est neuf, il est spontané et… naturellement malhabile.
J’apprends à nommer en écoutant le chant du vent, et nulle part je n’ai entendu musique plus douce que la sienne !
C’est l’arrivée de l’automne, me dit-on. Je me penche sur le balcon, au-dessus des ondes vertes frémissantes aux contours dorés, et j’attends avec joie d’accueillir l’automne ! Mais, qu’est-ce que l’automne ? Comment puis-je le reconnaître, puisque je ne le connais pas…
Automne : autonne, XIIIe; lat. autumnus : Saison qui succède à l’été et précède l’hiver, caractérisée par le déclin des jours, la chute des feuilles (dans le climat de la zone tempérée nord : 22/23 septembre-21 décembre).
L’automne succède à l’été et précède l’hiver !? Cela suppose que je sais l’été, que je sais l’hiver. Or, non ! Je débarque, et naturellement je ne comprends rien. Si ici l’on ne peut comprendre une chose que par rapport à une autre, c’est manifestement un monde où l’on ne navigue que du connu au connu…
Et si l’on n’a rien à quoi se rapporter, on ne comprend pas ! Est-ce bien cela ?
Jamais dans le neuf ? Mais, et l’inconnu, quand il vous visite, vous faites quoi avec ?
J’arrive et je souhaiterais apprendre de vous. Mais à partir du connu, ce n’est pas possible : je ne sais rien ! Je ne sais pas de quoi vous parlez, je ne connais pas vos mots ni vos concepts…
Je suis l’étrangère, je suis en transit, je ne suis pas de ce monde. Infiniment petite, je suis impermanente telle un nuage… Je ne connais rien d’autre que le mouvement des fougueuses étoiles aux jaillissements insaisissables…
Et si vous ne voulez pas apprendre de cela, apprenez-moi ce que vous êtes, et dans quel monde nous sommes ici.
Comment faire pour communiquer avec vous ?
t.
– Eh ! qu’aimes-tu donc, extraordinaire étrangère ?
– J’aime les nuages… les nuages qui passent… là-bas… là-bas… les merveilleux nuages!
Baudelaire
source de cette merveilleuse photo