Si le grain ne meurt pas…

Depuis toujours, la plupart des religions nous enseignent que le moi est haïssable, que l’on doit y mettre fin et retrouver le Soi cosmique. Depuis toujours il est enseigné que le Monde, avec tout ce qu’il contient, est le Royaume du mal, et que de ce fait le « Paradis » ne peut être qu’ailleurs.

Depuis toujours, on enseigne qu’il faut mourir, quitter définitivement ce corps périssable, pour se retrouver pur esprit dans la vie eternelle !

Depuis toujours on identifie l’homme à son physique, en indiquant bien que son physique est et ne peut-être que le fruit d’un péché, puisqu’il est mortel…

En fait, depuis toujours, on nous enseigne le culte de la mort et le refus du Monde !

Alors, si nous avons ainsi, depuis toujours, affirmé que le moi est haïssable, que le corps physique est le fruit d’un péché, que le monde est un lieu de perdition, pourquoi s’étonner aujourd’hui de cette indifférence universelle, de cette haine de soi dans laquelle nous avons (presque tous) sombré ?

L’enchaînement est implacable : haine de soi induite par le discours religieux dominant, refus des religions qui en résulte, refus résultant de toute forme de transcendance, puis négation de la poésie, matérialisme foncier, cynisme radical, désespérance…

Alors, puisque « D.ieu est mort », et que « l’autre monde » n’est qu’une chimère, il ne nous reste, pour seule réponse, que le Nihilisme.

Et l’existence se résume à trois petits tours et puis… RIEN !

Rien d’étonnant, dans ce cas, à ce que nous nous soyons tournés vers un monde où seuls comptent le physique, les biens de consommation, et où la jouissance immédiate est l’unique but.

Un monde où l’Être a fini par être presque complètement effacé par l’avoir et le paraître, à tel point qu’Il n’est même plus nommé, et que si d’aventure il lui arrive de l’être, ce n’est que pour être objet de mépris, et faire passer celui qui le nomme pour un demeuré !

Ô la grande méprise des sens, ô l’immense méprise !

Car en vérité, le moi n’est qu’un autre aspect du Soi. Le Monde est sa Terre, le lieu où la graine qui est le moi doit germer pour en faire son paradis, ici et maintenant !

Seulement, il doit accepter de mûrir, car… « Si le grain ne meurt pas… »

Or le moi, cette graine splendide qui devait, en mûrissant, donner naissance à une créature nouvelle, née de l’esprit, à la fois pleinement humaine et divine par son amour, son intelligence et sa créativité, cette graine si prometteuse s’est épuisée dans la contradiction de son état inachevé. Dans l’incapacité de comprendre le monde, de se comprendre, cette graine qui devait être le moyen est devenue le but.

Au lieu de mûrir et d’engendrer l’Humanité, elle se décompose de l’intérieur, se boursouffle au point de devenir un « ego monstre », enlisé dans le vide de la désespérance.

Alors, allons-nous avorter de l’humanité ?

Cela dépend de nous !

Voilà ce que j’ai compris de ce que la Vie – bénie soit-elle ! – m’a enseigné :

– tout simplement qu’il fallait « mourir avant de mourir », car on ne devient une nouvelle créature qu’en mourant d’abord à soi-même ;

– mais que cette « mort » est, ne peut être que psychologique, car ce n’est pas à soi-même que l’on meurt en réalité, mais à l’idée (limitée, conditionnée, séparée) que l’on a de soi-même ;

– que le moi n’est pas haïssable, mais qu’il doit accepter de mûrir à la lumière de ses expériences, germer de l’intérieur ;

– et qu’une fois ce processus constitué, structuré, assimilé, c’est par sa propre énergie qu’il se brisera de lui-même, donnant naissance à une « nouvelle créature », née de l’esprit cette fois…

Elle m’a appris que cet « homme nouveau » abolira la veille croyance par laquelle l’homme s’identifie à son physique, qu’il n’errera plus dans le labyrinthe de la perception sensible, où il ne retrouve jamais que sa propre image réfléchie. Grâce à l’expansion de « sa » conscience, il fera l’expérience d’un monde unifié englobant tout ce qui est, du cailloux à la galaxie, en passant par les animaux, les végétaux, l’Homme.

Qu’il comprendra que la vie est à la fois physique et psychique, et que c’est la conscience qui fabrique ce monde phénoménal, et non l’inverse !

Cette nouvelle perception unifiée, spontanée, libre, intemporelle, ouverte à la pénétration directe, fera l’expérience immédiate de l’unité de tout ce qui est. Et l’unité de tout ce qui est, c’est l’Amour ! Le Paradis. La Paix. Le Royaume des cieux. D.ieu !

???

t.0

Exquise délicatesse : de l’évanescence au point Zéro

Comment pourrais-tu, étant immobile, te mouvoir dans le vide et chevaucher le vent ?

Tous ces masques sont lourds à porter, et l’Être est plus léger que l’air !

Oui, comment pourrais-Je, étant immobile, me mouvoir dans le vide et chevaucher le vent ?

Je n’ai pas de savoir-faire pour Cela !

Tout savoir est temps déployé, et la conscience est éternelle immédiateté.

Dessaisissement volontaire,
Déprise de la maîtrise acquise sur soi.

Tout personnification est lourde à porter, et l’Être est plus léger que l’air !

Je me déposséderai de moi-même, de l’idée même de moi-même.
Je m’abandonnerai de manière à laisser faire le vent.
Je me laisserai emporter par le vent , absorber par le vent.

Comment pourrais-Je ÊTRE pleinement vide et inspirer le vent ?

Toute appellation est lourde à porter, et l’Être est plus vide que le vent !
Toute substance est lourde à porter, et l’Être est moins encore que le Rien !

Plus vide qui le vide, l’Être est !

SOLITUDE FONCIÈRE

Et puis…

Du dedans du dedans de l’infiniment obscur, mystérieux et abyssal silence
De l’ultime particule évanescente
Du quasi Rien…
Jaillit La Lumière !

t.0 ???

Regardant sans voir on l’appelle Invisible ; écoutant sans entendre on l’appelle Inaudible ; palpant sans atteindre on l’appelle Imperceptible ; voilà trois choses inexplicables qui, confondues, font l’unité. Son haut n’est pas lumineux ; son bas n’est pas ténébreux. Cela serpente indéfiniment indistinctement jusqu’au retour au Non-chose…On le qualifie de Forme de ce qui n’a pas de forme et d’Image de ce qui n’est pas image…

Lao Tzu Livre de la Voie et de la Vertu (chapitre XIV)

Confondante simplicité

La fin’amor

De nom en nom, d’appellation en appellation, toi et moi, avons fini pour nous rejoindre, dans le seul nom que nous pouvons enfin échanger, partager, où nous pouvons nous reconnaître ! Joyeuse dualitude, infinie tendresse du face à face… L’être humain se révèle être l’unique sceau de l’alliance, le seul et unique Nom que nous convienne, le seul dans lequel nous réalisions l’union sacrée de nous-mêmes en nous-même ! Être Humain, lieu où le Divin s’est fait humain et où l’humain se révèle comme le Divin. Humain, tout simplement… HUMAIN.

Au hasard, Balthazar !

Nous vivons la plus extraordinaire aventure de tous les temps… la fabrication d’un être qui n’existe pas encore sur la Terre.
Pour que l’espèce humaine se transforme en humanité, l’homme doit s’orienter du « dehors » vers le dedans ; du monde des images vers le monde essentiel, si nous souhaitons, désirons, voulons que demain existe encore !

Ma mie, est-ce que tu m’entends ?

Tout est calme et Baux, tout respire la grâce, la beauté. Ces pures splendeurs et ces mers de pierres alentour. Et l’infini de ce silence parsemé d’invisibles d’étoiles !

Soudain, le mistral souffle quelques brins d’herbe de Provence, la douce senteur de cette terre bénie embaume le vide et puis, et puis… derrière le hurlement du vent , j’entends la plainte de la Terre :

– Ma mie, est-ce que tu m’entends ?

– Oui ! Mère miséricordieuse, compatissante, infinie tendresse, merveilleuse Amor !

– Ma mie, ne vois-tu rien venir ?

– Si, si, Mère, si… est-ce la fin ?

– Non, nous ne sommes qu’au commencement de cette fin. Le cycle achevé, tout doit recommencer, mais seulement par la spirale de la fraternité, de la solidarité humaine, de l’Amour

– L’Homme n’aime pas, mère, l’Homme ne s’aime pas… L’Homme ne (se) connait pas, l’homme ne (se) comprend pas… Peut-on être fraternel sans aimer, peut-on aimer sans (se) connaitre, sans (se) comprendre ? Comment aller vers ce qu’on ne connait pas, Mère du monde ?

– L’Homme doit retourner les yeux au-dedans, tendre l’oreille vers l’intérieur et se laisser guider par la voix silencieuse, qui indiquera la Voie à suivre.

– Tu le sais, tu le sais, Mère : ils ont des yeux mais ne voient pas, ils ont des oreilles mais n’entendent pas…

– Celui qui n’entend pas le murmure de la brise, entendra le hurlement de la tempête solaire ; celui qui ne ressent pas la caresse du souffle, sentira la chaleur intense du Vent Solaire. Crois, ô Être humain, rien ne va se perdant pour toi !
Ma mie, est-ce que tu m’entends ?

t.0 ????

Poïésis

« Si les vieux imbéciles n’avaient pas trouvé du Moi que la signification fausse, nous n’aurions pas à balayer ces millions de squelettes qui, depuis un temps infini, ! ont accumulé les produits de leur intelligence borgnesse, en s’en clamant les auteurs ! »

Les « grandes » personnes mentent, elles sont cyniques et désabusées… Ne les croyez pas !
Les « grandes » personnes mentent toujours !

Seule la poésie réconciliera les hommes !
Seule la Beauté sauvera le Monde !
Seule la Musique rétablira l’équilibre !

Le penchant vers la platitude continuera… Mais des signes d’une aurore nouvelle se lèveront. Cette aurore, cette révolution neuro-poétique se laisse déjà entrevoir à travers la nuit obscure. La servitude volontaire, la servilité obséquieuse envers la plate pensée, le conformisme à la médiocrité mercantile, vont in fine corroder le vil métal, et faire sortir, malgré tout, à cause de tout, l’essence musicale de la Vraie Vie !
Non, le monde n’est pas voué sans appel à la platitude, à la médiocrité.

Il y a un temps pour tout ! Le temps de la Poïésis est arrivé, pour que demain existe encore !

« De l’Amour nous sommes issus, selon l’Amour nous sommes faits »

t.0 ????

Anne-Sophie Mutter at 13 with Herbert Von Karajan

«Mens agitat molem» (c’est l’esprit qui fait mouvoir la matière).

S’éveillant à soi-même, l’homme s’est éveillé à D.ieu. S’éveillant à D.ieu, il s’est éveillé à Soi, au-delà de D.ieu et de Soi !

Soudain, dans un seul espace indistinct, le dehors et le dedans ne font qu’un ! Dans le Silence, la Présence ! Jaillissement du souffle, ouverture de l’Ouvert !

Au dedans du dedans, dans le silence le plus profond, irradie la flamme immortelle. Plénitude ici, plénitude là, plénitude plus intérieure que soi-même. Plus Vrai et Plus Réel que le Vrai et le Réel !

Tout et Rien, Plénitude vide, Plénitude du Vide, Avant le Tout, au-delà de tout…
Au-delà de Tout, quel autre Nom peut-on donner à Cela ?!

Silence !
L’Être est Vacuité ! La Vraie Parole est Silencieuse ! La seule louange, c’est Le Silence !

Alors je me tais…

t.0 ????

Fernando Pessoa

Plus je grandis, moins je suis. Plus je me trouve, plus je me perds. Plus je m’éprouve, plus je vois que je suis fleur et oiseau et étoile et univers. Plus je me définis, moins j’ai de limites. Je déborde tout. Dans le fond je suis le même que Dieu.

Dans la nuit où sont nées les étoiles, j’ai commencé à me consteller d’être. Il n’y a pas un seul atome de la plus lointaine étoile qui ne participe à mon être.

Maître Eckhart

Dans cette divinité où l’Être est au-delà de Dieu, et au-delà de la différenciation, là, j’étais moi-même, je me voulais moi-même, je me connaissais moi-même, pour créer l’homme que je suis. Ainsi je suis cause de moi-même selon mon essence, qui est éternelle, et non selon mon devenir qui est temporel. C’est pourquoi je suis non-né et par là je suis au-delà de la mort. Selon mon être non-né, j’ai été éternellement, je suis maintenant et demeurerai éternellement. Ce que je suis selon ma naissance mourra et s’anéantira de par son aspect temporel. Mais dans ma naissance éternelle, toutes les choses naissent et je suis cause de moi-même et de toute chose.

Si je l’avais voulu, ni moi-même ni aucune chose ne serait, et si je n’étais pas, Dieu ne serait pas non plus. Que Dieu soit Dieu, je suis la cause ; si je n’étais pas, Dieu ne serait pas.
Mais il n’est pas nécessaire de comprendre cela.