Murmure de sable

– Tu dois laisser le vent t’emporter à ta destinarion.
– Mais comment est-ce possible ?
– En te laissant absorber par le vent.
*

J’aime à penser que je suis vide et vaste.
J’aime à penser que je suis air et vent.
J’aime à penser que je suis le paysage traversé par l’air et le vent.
J’aime à penser que je ne suis personne.

Mais surtout, j’aime ne pas penser mais… Être.
Être, simplement Être ! Là.

t.

*Le Conte des Sables, in Contes Derviches, Idries Shah, Courrier du Livre, Paris.
Photo: Desert de Gobi

Le Chant de la Transparence

Le Chant de la Transparence

Une fois arrivée au sommet de la montagne, je grimpe encore et j’entend (enfin !) le chant de la transparence, harmonieux et pur, qui va se déployant en harmoniques et s’approfondissant à la juste mesure de la fondamentale jusqu’au jaillissement de la matière substantiée.

Me voici face à face, vide et plénitude unie par une presque infinie distance, touchée par tant et tant d’intime silence. L’être, perçu en trans-apparence, comme une sorte d’irréalité (aussi réelle que la réalité peut l’être) et à travers la transparence diaphane, la communion poétique s’accomplit en fait !

Et qui est cet étrange reflet vu ? Est-ce moi ? Est-ce toi ? Ou est-ce la lumière évanescente de nos projections anciennes ?
Me voici enfin au-delà des images, revenue à la nudité primordiale ! L’image a vu le créateur d’ images, et l’ayant vu elle a compris son origine et sa destinée.
Vide, rien que vide, plus de moi, plus de toi ! Rien.

Rien et pourtant… l’ineffable joie est là !

Arrivée au sommet de la montagne, je grimpe encore, encore…

t.
Paysage (partie inférieure), par Sesshû, 1481

Hommage à la quête perpétuelle d’un improbable équilibre

NON à l’Appel des sirènes !

La faiblesse de la volonté (l’akrasie) conduit souvent à vouloir le meilleur et pourtant faire le pire. Comment donc s’assurer de rester en accord avec soi-même ?

Il convient certes de respecter un principe d’humanité et de non-cruauté, équilibrant devoir et pouvoir. Car on ne doit que ce que l’on peut, et il serait inhumain d’exiger l’impossible comme devoir, et tout autant d’interdire le nécessaire (ce qui ne peut pas ne pas être).

Mais il est néanmoins possible de renforcer le lien entre pensée et action : plutôt que de compter sur ses propres forces, nécessairement limitées et soumises à cette « akrasie », se donner des contrôles extérieurs à soi qui vous rappelleront le moment venu vos promesses et votre devoir (choisis et assumés par vous antérieurement).

On peut ainsi augmenter nos chances de rester fidèles et ce que l’on croît, c’est-à-dire accorder notre action à notre pensée, et ainsi préserver notre intégrité même lorsque les sirènes appellent. Pour cela, il faut compter sur l’Ami réel, le Vrai, car l’Ami est là pour ça ! N’est-il pas l’alter ego, le meilleur de nous-mêmes, qui nous rappelle au bon moment le désir de nos coeurs, nos promesses faites à nous-mêmes et notre devoir envers nous-mêmes de les accomplir ?

Livrés à nous mêmes, nos forces sont plus faibles que nous ne l’imaginons, mais heureusement l’ami est là pour nous soustraire à la fascination et nous détourner du chant des sirènes.

Allons-nous renoncer à nos engagements envers nous-mêmes et nos semblables, notre planète ? Allons-nous oublier notre promesse (donc notre devoir) d’unité ? L’union est plus forte que la division. La devise fondatrice « Liberté, égalité et fraternité » peut aussi agir comme un rappel.

Voilà pourquoi, à des moments critiques, nous rappeler les uns aux autres nos choix et nos combats de toute une vie reste le meilleur service que nous puissions rendre à la vie et à nous-mêmes.

Allons encore et toujours vers ce qui nous unit.
À vos consciences, les Amis ! (Aux urnes, citoyens !)

Humainement,
t.

Peintre de la Sirène (attribué au)
Ulysse et les sirènes (détail)
stamnos à figures rouges
Ve siècle av. J.-C.
Londres, British Museum