Hommage à L’Ami Maurice Béjart qui s’est envolé à 4 fois 20 ans !

Maurice Béjart est parti faire danser les étoiles

O jour, lève-toi,
Les atomes dansent,
Les âmes éperdues d’extase dansent,
La voûte céleste, à cause de cet Être, danse;
A l’oreille je te dirai où l’entraîne sa danse;
Tous les atomes qui se trouvent dans l’air et le désert,
Sache bien qu’ils sont épris comme nous,
Et que chaque atome heureux ou malheureux
Est étourdi par le soleil de l’âme inconditionnée*

*Djalal Al-dîn Rûmi
Traduction: Eva de Vitray-Meyerovitch

Le soleil est dans mon sein, les étoiles sont dans les plis de mes vêtements.

Le soleil est dans mon sein, les étoiles sont dans les plis de mes vêtements.
Si tu me contemples, je ne suis rien. Si tu regardes en toi, je suis toi-même.
Dans la ville et la campagne, dans le palais et la cabane, je suis la douleur et ce qui l’apaise, je suis la joie infinie.
Je suis l’épée qui déchire l’univers, je suis la source de la vie.
Les Gengis-Khan et les Tamerlan ne sont qu’une poignée de ma poussière.
Le tumulte de l’Europe n’est comparable qu’au moindre de mes échos.
L’homme et son univers ne sont qu’une de mes esquisses,
avec le son de son cœur, je colore mon printemps.
Je suis le feu brûlant, je suis le paradis du Très-haut.
Vois cet étrange spectacle: je suis à la fois immobile et mouvant.
Dans ma coupe d’aujourd’hui, vois se refléter demain.
Vois cachés dans mon cœur mille mondes éclatants,
vois mille étoiles qui roulent et mille coupoles du ciel.
Je suis le vêtement de l’humanité, et la robe de la divinité.
Le destin est l’un de mes artifices, la liberté humaine vient aussi de moi.
Tu es l’amant de Leyla, je suis le désert de ton amour.
Je suis comme l’esprit, au-delà de ta recherche.
Tu es le secret de mon cœur, je suis le secret du tien.
Je me manifeste par ton esprit, je suis caché dans ton esprit.
Je suis le voyageur, et tu es mon but. Je suis le champ, et tu es ma moisson.
Tu es la musique de toute harmonie. Tu es l’esprit de la vie.
O vagabond fait d’eau et d’argile, vois l’immensité de ton propre cœur:
un océan sans borne, contenu dans une coupe.
C’est de tes hautes vagues que s’élève la tempête.

Mohammad Igbal
Message de l’Orient, traduction d’Eva de Vitray-Meyerovitch et M. Achena, Paris, 1956, Les Belles Lettres éd.

Hommage à M33 X-7 ou De ce que nous ne savons percevoir

C’est après un très long périple que le « chez-soi » — habiter à la fois chez soi, en soi et pour soi — se révèle au mortel.*

L’INTERCEPTION

Fil de Lumière entre Cela et Ceci, l’image même du Vide, éternel surgissement… du même.

La Voix qui est la Voie affirme, constate, témoigne de l’immédiateté jaillissante… du même.

Elle dit, ou plutôt, elle cherche à dire son étonnement d’être-là, soudainement là, immobile au milieu du vide, dans le mystère… du même.

L’imperceptible bourdonnement de la Ruche, jaillissement éternel du Réel, invisibilité foncière… du même.

À L’ÉVIDENCE

L’évidence voile !

Seul, l’espace s’éternise !

Entre Cela et Ceci, rien qu’un imperceptible murmure… du même

Entre Soi et soi-même, nulle solitude.

t.

*Philippe Sollers – l’isolé

©Nasa – Représentation du trou noir stellaire M33 X-7 

Viens dans l’Ouvert, ami !

Gay Savoir.
Fol vagabondage.

Bras ballants, bouche bée, interdite d’admiration…
Stupéfaction radicale.
Bonheur suprême, suprême sagesse,
Rien, rien, rien,
Enfin…

Rejetée la peau, cette chose qu’on appelle ‘Moi’.
Ô vide infini !
Face à face, vide et vacuité !

Moi ? Rien qu’un masque…

Il fallait bien porter un masque.

Mais quelle mascarade, in fine !

Viens dans l’Ouvert, ami !

Le vent balaie les nuages, les yeux en font autant…

Il y a voir et voir…
Voir en survolant, en balayant, d’un coup oeil, plus ou moins discret et flou, confusément… et voir attentivement, d’un regard perçant, percevoir, en-visager de l’intérieur ce qu’un paysage, un visage, dévoile.

S’appliquer à voir, regarder afin de voir autrement, voir clairement, profondément, non plus la seule apparence, mais l’intention, l’essentiel, qui est invisible aux yeux mais in-scrit dans l’Ouvert !

Le véritable Voir est celui qui scrute les profondeurs de l’Être et des choses, et ainsi perçoit l’Intention.

Il y a donc un Voir confus qui survole, qui balaie d’un coup de vent et chasse la chose vue… et un Regard attentif, conscient, qui scrute, creuse, plonge au plus profond à la recherche de l’intention, de l’essentiel.

Viens dans l’Ouvert, ami !

t.

© René Magritte, Faux miroir, Moma

Terra di Siena

La toscane par Sacha Quester-Séméon

Émouvante impression de cheminer à l’intérieur même d’un tableau, comme si en chaque paysan se trouvait un peintre qui aurait composé chaque détail de son champ sur un mode poétique. Œuvre d’art que le tracé de cette route qui zigzague à flanc de colline ! Œuvre d’art encore la disposition des cyprès qui la bordent et qui, un peu plus loin, se serrent les uns contre les autres tels d’anciens amants, et dont on se demande qui, de l’homme ou de la nature, les a si magnifiquement ciselés.

Terres intimes peuplées de paysans inspirés, héritiers d’une Renaissance italienne qui inventa la perspective et l’humanisme, privilégia la semplicità d’un pur espace et sut à merveille être au service des couleurs et de la lumière.

Et quelle lumière !

Lumière dorée, d’une infinie tendreté qui caresse la terre blonde et brune des champs et enveloppe amoureusement cette campagne toscane que l’on dit la plus humaine au monde.

C’est avec une infinie tendresse et une inclinaison profonde que je retrouve cette terre miraculeuse et ses couleurs variant au gré des saisons (vert tendre du printemps, chaumes dorés de l’été, rouges et bruns de l’automne, gris luisant de l’hiver) où ne cessent d’avoir lieu les noces parfaites de la nature et de la culture, de l’âme et de l’esprit !

Miracle d’une nature recueillie, discrète et cultivée, qui déploie sous nos yeux réenchantés l’un des plus beaux paysages du monde !

Firenze, Pienza, Siena… que des prières exaucées !

t.

Photo : © Sacha Quester-Séméon aka Justin Biziou