Et si la crise n’était pas celle qu’on croit ?
Et si la cause de la crise actuelle n’était que l’immense fatigue d’une civilisation enfermée dans une carapace de fausses valeurs illusoires, où plus rien n’a de sens, où les mots ont perdu leur substance, où chacun vit sans savoir pourquoi il vit ?
Certes, nous faisons tout ce que nous avons envie de faire, et nous avons créé une civilisation de divertissement, avec pour seul moteur notre désir de vivre une vie toujours plus excitante. Mais nous ne sommes jamais satisfaits ! Et pour cause…
Peut-on vivre sans qu’il y ait un sens, sans réelle raison d’exister, à la fois particulière et universelle ?
Sujets consentants d’une servitude volontaire au service de l’assouvissement de toutes nos pulsions, nous avons décidé que le sens de la vie était la recherche de la toute puissance, et la satisfaction de nos désirs. Or nos envies, changeantes et mouvantes comme notre imagination débridée, sont comme des entonnoirs sans fond, jamais comblées. Nous sommes probablement la première civilisation où la seule raison d’exister est de consommer le maximum dans le temps qui nous est imparti – y compris les ressources de la Terre !
Personne (ou presque) n’éprouve plus pour personne la moindre sym-pathie, la moindre solidarité. Chacun pour moi et le vide existentiel pour tous !
Éternels insatisfaits, épuisés de l’intérieur, desséchés, égarés au milieu de nulle part. Notre crise est celle du défaut d’humanité, de l’absence de sens, dans un monde désorienté qui, en niant l’âme du monde, s’est voué au désenchantement et à la mort spirituelle !
Seul, face à son vide existentiel, l’homme occidental est à lui-même sa propre crise !
Et pourtant… Le Paradis n’est pas perdu, nous sommes dans le Paradis !
En contemplant, derrière l’azur, le noir glacial et infini de l’univers, je me dis, comme à chaque fois : qu’elle est belle la Terre, planète océan, belle à en vivre, magnifique Île Verte enveloppée de translucidité nourricière et protectrice de vie.
Terre aimante, point final de nos errances, hôte gracieuse, si fragile et précieuse, accueillante, bienveillante.
Humble et discrète
Terre
Mère
Veilleuse
Île flottante dans l’océan sidéral,
Puissions-nous être de ceux qui ne te trahiront pas,
Puissions-nous être de ceux qui ne nous trahirons pas !
Michelangeli – Ravel Piano Concerto – [2] Adagio assai