Dans l’esprit de l’homme normalisé, l’humanité se fonde sur la raison, l’intérêt, l’utilité, la compétition, la possession, l’ordre… sur tout ce que l’on voudra, mais jamais sur la poésie ! Pour lui, la poésie sera toujours un excès de sentimentalité, une inaptitude au réel, une demeure mensongère pour les fous… L’homme normalisé refuse tout dépassement, toute transcendance, car il vit dans la croyance en la toute puissance de l’entropie, de la mort ! Misanthrope et destructeur, il a insinué le doute partout, désespérant ainsi le monde et se désespérant lui-même. Pour nous en sortir, il nous faut une immense énergie, une puissance inouïe permettant à cette énergie de vie et de bienveillance, à cette pure Bonté qui est la vie, de jaillir en poésie et ainsi de nous faire renaître ou simplement naître au monde, à la vraie humanité ! Sortir d’un monde où « la vraie vie est absente », du « royaume de l’être mort », pour accéder au « royaume de la vie ».
Ce que tu as appelé monde, dit Zarathoustra, il faut commencer par le créer – ta raison, ton imagination, ta volonté, ton amour, doivent devenir ce monde.
Or le poète ne quitte pas le monde, contrairement au moine (même s’ils ont de aspirations communes) : il plonge dans le monde. C’est à partir de ses expériences de la terre et des hommes qu’il construit son propre monde, plus riche, plus intense, plus authentique ! Le monde ne signifie pas pour le poète la « réalité objective » : il sait le monde fait d’événements de pure énergie que la pensée de l’homme interprète comme des objets figés. Le poète, l’être humain, cherche des réalités plus subtiles, des choses derrières les choses…
Le poète se trouve sur la Terre dans une situation de grande perplexité, conscient de la profondeur abyssale et de l’étendue infinie de « son » être. Il ne se nomme pas. Pas encore… Il se sait vaste car « il contient des multitudes ». Et c’est ici, dans ce seuil de tous les dangers, ici seulement, que commence la poésie.
Dans l’esprit de l’homme normalisé, le « monde » signifie le modèle fixe de perceptions auquel il s’adapte plus au moins pathologiquement. Le poète, lui, vit et pense dans un « monde » toujours inachevé, en perpétuelle création, où tout est vivant, vibrant, frémissant, où il n’y a que des présences !
L’unique Trait du Pinceau – Cheminements
Quand bien même le pinceau ne serait plus pinceau… il ne saurait peindre le dehors. Quel dehors ?
Pourtant, puisque ici la vraie vie est absente, il faut « s’en aller », « sortir »…
Ayant traversé les plaines arides de l’attente, au-delà de l’espoir et du désespoir, accepter de s’échouer sur rivage de la solitude, de vivre au lieu de simplement exister.
Que de souffrances, que d’aliénations dans les paysages mentaux d’un monde apoétique, dans une existence mentale errante et aberrante.
S’en aller, sortir…
S’en aller, sortir… de quoi ?
De la pesanteur de la malveillance, de la médiocrité nihiliste érigée en modèle, de l’étouffement de la pensé linéaire…
De la perversité qui nous fait à la fois assassins et bourreaux de nous-mêmes. De notre impuissance à assumer la bonté, l’innocence, à assumer l’humain – celui qui Est !
Sortir, donc… pour aller vers quoi ? Et comment ?
Il s’agit d’abord de s’assouplir, de se spatialiser, de s’universaliser. Sortir de la platitude et prendre l’envol vers l’aurore, vers la limpidité poétique qui nous fait voir, comme en une perception stellaire, l’émouvante simplicité de l’être, la rencontre du Seul avec le Seul ! Là où l’idée Déliée se retrouve dénudée et infiniment Simple, Forme et sans Forme, Pleine et Vide, indifférenciée et indéterminée, affranchie… Libre, libre, libre ! Bonne et Belle !
Sortir, donc, pour aller vers RIEN. Se laisser emporter par le vent solaire, qui souffle n’importe où dans ce lieu qui est un non-où…
Seul(e) à Seul(e) au milieu du non-où infini, l’espace se dévisage soi-même.
Un grand, un immense silence règne.
Soudain, des chuchotements dans cette immobilité perçue comme l’apogée d’une infinité de mouvements, de tous les mouvements erratiques accomplis hors de soi-même.
Et que dit le chuchotement du vent, du silence et du vide ?
L’essence même (de l’homme) est poétique, et nul ne peut vivre humainement sans la Poésie !
t, aka n’importe qui.
Le long du chemin, en maints lieux traversés :
Traces de sabots sur le tapis de mousse…
De blancs nuages entourent l’îlot paisible ;
Derrière les herbes folles, une porte oisive.
Comtempler, après la pluie, la couleur des pins
Puis atteindre, au delà du mont, la source.
Une fleur dans l’eau éveille l’esprit du Chan.
Face à face : déjà hors de parole.
Liu Changqing, 8ème siècle
@Dessins de Shitao (moine Citrouille Amère)
Comme un arbre qui a besoin d’eau et d’attention pour s’épanouir, l’humanité s’entretient, se cultive, se mérite. D’une étonnante actualité, vous écrits sont empreints de sagesse et de sérénité.. Votre simplicité frappe autant que la poésie qui en émane.
Merci d’apporter tant de tendresse à ce monde qui se défend d’en partager.
Invitation à la Danse, tourbillon ascensionnel, transcendance,
A dénouer l’écheveau tout mêlé de nos pensées tout étriquées
Sortir de la mortelle platitude
Prendre un peu de hauteur, monter voir là haut un paysage différent,
écouter chanter le vent, faire un tour en nuage, respirer un air vivifiant,
S’ouvrir
Je vous remercie du rappel
Quelques cailloux sur notre chemin de Petit Poucet. Comment devenir humains et libres, parce que nous ne savons pas encore et croyons déjà l’être un peu. C’est ce que je ressens à vous lire, inspiré, emporté, élevé par le pinceau de vos paroles. Vous nous annoncez que c’est possible sur les ailes de la poésie, au travers d’un chat d’aiguille certes, mais à notre porté pour peu que… comme le rameur nous allions sans faiblir vers notre but.
Merci de chuchoter ainsi à nos oreilles, comme un bourdonnement d’abeille bienveillante fait don de son miel.
Fils dénoués de la parole dépouillée
En son essence de poésie
mots ciselés dans la verticalité
comme des marches
corde de l’appel, du rappel
tissée de rayons de lumière et d’espérance
tendue comme une main ouverte et bienveillante
qui dit viens goûter à la Vie
loins des mots creux et du monde doré, la réalité d’un monde oublié mais bien réel:
http://blogs.lesoir.be/colette-braeckman/2008/03/05/femmes-du-kivu-il-y-a-du-mensonge-dans-lair/
pour t… et ses semelles de vent
…HORS DE PAROLES…dans les saveurs renouvelées…du monde…quand… LA RÈGLE C’EST L’ÉCART
La règle c’est l’écart
Non des sens à la Rimbaud
Qui revenu de ses dérèglements
S’en alla vivre du commerce des colonies
La règle c’est l’écart
Avec la norme morale qui vous met d’équerre
si elle exclut le désir
Avec la norme lexicale
qui vous met dans l’impasse
des clichés et de stéréotypes
La règle c’est l’écart amical
qui vous conduit par résistance et rejet du langage cuit
à imaginer à innover
ce bon petit plat
que vous élaborez
sentez pesez goûtez
puis livrez à la merci d’autrui
qui va l’écarter le gober
ou peut-être en faire tout un monde
de saveurs uniques et renouvelées
C’est vrai mour moi aussi la poésie est ce chemin
pour sortir… pour aller vers ce « rien » qui n’est pas négation du monde mais au contraire pour entrer plus dans la réalité dégagée de toute systèmatisation « dénudée et infiniment simple »…où le vide et le plein s’épousent simplement et tranquillement…Virginia Woolf appelle le poète le visionnaire!!Mais ce chemin est chemin
de solitude…
la pluie
au vent des quatre vents
creuse la toile
anna
magnifique aussi.. l’esprit de ces pages
J’ai failli passer mon chemin… Ne rien écrire, tellement tous ces textes (l’initial et l’accessoire : ce billet et les commentaires) sont beaux.
Et puis, finalement, je ne peux rester muette. Ce monde m’insupporte souvent et puis je tombe sur une brise légère, une irisation qui me montre, joueuse et tendre, que le soleil est toujours là et je souris en reprenant le chemin parmi mes semblables.
Le monde visible est lourd, l’invisible, que l’on touche du doigt avec ce blog, est magique!
Merci.
La Rêveuse
Pas de Sésame
Pas de lampe d’Aladin
La poésie n’ajoute rien parmi les ombres
Son battement excède tout
Je ne suis rien
Elle m’invente
Gaston PUEL
Décidément, que j’aime vos mots !
lita
nul ne peut vivre humainement sans la Poésie !