HOME planète

exode
Photo : Sebastião Salgado

Hier, en visionnant sur l’Île Verte, le très beau film de Yann, « HOME« ,  je me suis dit qu’il fallait vraiment le remercier, lui, et tous ceux qui ont permis que le film existe et soit largement diffusé. Il reste néanmoins que le problème majeur de notre situation présente sur Terre, qui contient en lui-même la solution, n’a pas vraiment été abordé… La pollution est mentale avant tout, la dégradation de notre Maison/Home est en rapport direct avec la dégradation de nos valeurs humaines : fraternité, solidarité, respect de la dignité de chacun… L’Occident n’est certes pas la totalité de la planète – heureusement ! –, et la vision occidentale, je dirais même française, est et reste limitée à ses propres limites.

C’est parce que nous sommes individualistes, égoïstes et superbement arrogants, que nous avons érigé l’avoir en valeur suprême, au détriment de l’être : la possession comme mode de vie, comme but ultime. Nous voulons toujours plus et ne sommes jamais satisfaits – dans le matériel comme dans les rapports humains.

C’est cette avidité qui est la source majeure de l’épuisement de notre Home. Nous ne croyons qu’au progrès, qui nous apportera toujours plus, et refusons toute idée de progression intérieure. Nous n’aimons pas la transcendance. Nous vivons à courte vue, ne voyant pas plus loin que le bout de nos désirs de consommer toujours d’avantage, coûte que coûte, jusqu’à la totalité de nos ressources humaines et terrestres. Nous ne transmettons plus rien : ni les ressources de la planète, ni les valeurs culturelles, ni les responsabilités, économiques et politiques, auxquelles on s’accroche jusqu’à son dernier souffle, ni même les moyens financiers accumulés, utiles parfois au développement de nos enfants, mais que le fameux progrès nous permet de dépenser jusqu’au terme d’une vie toujours plus longue, dans le seul but d’une jouissance immédiate et sans limites.

Je sais par expérience que ce perspective est plus difficile à embrasser qu’une perspective somme toute technique sur les conséquences de l’utilisation abusive du pétrole, de l’agriculture intensive, de la déforestation et de l’exploitation insensée des ressources. Ce discours conduit finalement à l’idée que tout ne va pas pour le pire dans le royaume de l’occident, puisque le problème est maintenant identifié et que la science des pays riches a trouvé des solutions, qu’il suffit en quelque sorte d’appliquer : le miracle aura forcément lieu ! La formule « il est trop tard pour être pessimiste » résonne comme une incantation dans le film. Mais il ne s’agit ni d’optimisme, ni de pessimisme : il s’agit de l’état des lieux – sur tous les fronts, y compris humain –, et de notre capacité à en prendre acte. Pour qu’il y ait changement, il faut que l’homme change, et cela dépend de nous, de chacun de nous. Il nous faut non seulement une prise de conscience individuelle, mais un développement de notre conscience qui l’amènera du particulier à l’universel. C’est la condition sine qua non pour que demain existe encore !

Une certitude : c’est de désamour que nous souffrons, ce désamour qui nous a rendu indifférents aux Hommes et à la Terre. Notre avidité aussi y trouve sa source.

Et si la solution n’était rien d’autre que ce mot d’ordre révolutionnaire : « Aimons-nous et aimons-nous les uns les autres » ?

AMEN. ????

t.0

La splendeur visible

Vagabondage au gré du vent…

Viens et vois
La Vie est partout, dans tout ce que tu touches et qui te touche
Le Bien est partout, dans tout ce que tu touches et qui te touche

Viens et vois
la splendeur de la Vie !

Tissés des imperceptibles chants, les champs se donnent à voir
qu’attends-tu pour cheminer au dedans ?

Viens et vois
Tout s’allège, ondoie, flotte
Entre ciel et terre
Détache-toi de toi-même
Ouvre-toi à l’Ouvert
Et vois
Les fils de lumière qui relient le Vivant au Vivant
L’Être aux choses
Dans la splendeur de toute vie sur la Terre

Goûte la Vie, redeviens lumière !

t.zéro


Jascha Heifetz – Debussy – La Fille Aux Cheveux De Lin

« Notre destinée, notre raison d’être ou d’aimer est dans l’infini, seulement là. » (William Wordsworth)

De la complaisance Dieudonnéenne envers l’abjection humaine

De la complaisance Dieudonnéenne envers l’abjection humaine

J’ai beaucoup réfléchi avant de poster ce message, car ce blog est un blog de vie, d’espérance et de foi en l’humanité, fait pour chanter la Vie et célébrer l’être humain, et non pour se condamner ou jeter des pierres. Mais comme nous le savons tous, hélas, nous sommes capables du meilleur comme du pire, et il est parfois nécessaire de dénoncer le pire, ne serait-ce que pour ne pas le reproduire ou y participer.

Je suis infiniment triste d’évoquer ce sujet, surtout en cette période de célébration de la lumière universelle, mais encore une fois, la réalité a dépassé ce qui pouvait être imaginé.

Comme le dit justement Pierre Assouline,  » leurs détracteurs n’auraient pas même osé en rêver : ils l’ont fait. »
Cela s’est passé chez nous, en France, plus précisément le vendredi 26 décembre, au Zénith de Paris, pendant le spectacle « J’ai fait le con » de Monsieur Dieudonné M’bala M’bala.
Un régisseur travesti en déporté, pyjama à étoile jaune présenté par Dieudonné comme « son habit de lumière », a remis à l’universitaire lyonnais Robert Faurisson, pionnier en France du négationnisme, un « Prix de l’infréquentabilité et de l’insolence ». Sous un tonnerre d’applaudissements, produit par les quelque 5.000 spectateurs présents…

Que pouvons-nous dire, écrire, penser ou faire pour empêcher la bête immonde de s’exprimer et de sévir ?

Comment faire en sorte que l’homme ne reproduise plus ce que le nazisme a organisé (je dis bien organisé, comme Dieudonné a organisé sa célébration négationniste) : une extermination méthodique et industrialisée, avec chambres à gaz et fours crématoires ?
Comment un tel système de mort, rationalisé et optimisé, a-t-il pu exister ? Et comment une telle abomination peut-elle être niée aujourd’hui en France ? Et comment cette négation même peut-elle être applaudie, sous couvert de la liberté d’expression ou, pire encore, avec l’aura de la transgression, de l’impertinence et de l’exploration artistiques ?

Il n’y a pas grand chose à ajouter. Mais dénoncer cette abjection, certainement !
Et comme dirait Primo Levi, « si ce n’est ainsi qu’il faut faire, quoi faire ? Et si ce n’est pas maintenant, quand alors ? »

Humainement,
t.

DEVOIR DE MÉMOIRE

En 1976, Primo Levi a rédigé un appendice à « Si c’est un homme », où il écrit :

« j’ai délibérément recouru au langage sobre et posé du témoin plutôt qu’au pathétique de la victime ou à la véhémence du vengeur : je pensais que mes paroles seraient d’autant plus crédibles qu’elles apparaîtraient plus objectives et dépassionnées ; c’est dans ces conditions seulement qu’un témoin appelé à déposer en justice remplit sa mission, qui est de préparer le terrain aux juges. Et les juges, c’est vous. »

[…]

Primo Levi se retrouve dans la file des déportés valides. Ceux-ci vont à la douche pour la « désinfection » puis se font tondre les cheveux et remettre un uniforme rayé et enfin tatouer un matricule. Levi a le numéro 174517. Tout cela rentre dans le cadre d’une entreprise de « démolition d’un homme ».

« Cet alignement de chiffres remplace désormais son nom, sa profession, sa personnalité, ses qualités et capacités. Primo Lévi est mort, remplacé par le Häftling 174517. Le numéro semble donner un certain nombre d’informations sur la place du prisonnier dans cette société particulière : on sait s’il est arrivé depuis longtemps, ainsi que d’où il vient, suivant la date des rafles. Le tatouage ressemble à un rite initiatique marquant l’intégration à une nouvelle société (« nous avons été baptisés »), de laquelle il va falloir apprendre et intégrer rapidement les normes et les attentes. Passage obligé dans la vie du camp, il marque également la contrainte : le tatouage est fait à vie : « aussi longtemps que nous vivrons nous porterons cette marque tatouée sur le bras gauche ».

[…]
“Mais dans la haine nazie, il n’y a rien de rationnel : c’est une haine qui n’est pas en nous, qui est étrangère à l’homme, c’est un fruit vénéneux issu de la funeste souche du fascime, et qui est en même temps au-dehors et au-delà du fascisme même. Nous ne pouvons pas la comprendre ; mais nous pouvons et nous devons comprendre d’où elle est issue, et nous tenir sur nos gardes. Si la comprendre est impossible, la connaître est nécessaire, parce que ce qui est arrivé peut recommencer, les consciences peuvent à nouveau être déviées et obscurcies : les nôtres aussi.???

Si c’est un homme (Se questo è un uomo) – Primo Levi

Primo Levi : résistant, fait prisonnier le 13 décembre 1943 à l’âge de 24 ans. C’est un juif italien parmi d’autres.
Arrive fin janvier 1944 à Fossoli près de Modène dans un camp d’internement. Déporté le 21 février 1944, il arrive à Auschwitz. Son témoignage est essentiel.

© photo -Yad Va Shem – Jérusalem

Et nunc, Rachida Dati !

HOMO HOMINI LUPUS ?!

Non, L’homme n’est pas (seulement) un loup pour l’homme.
Homo sum, et humani nihil a me alienum puto.

Même en sachant, pour en avoir fait l’expérience maintes et maintes fois, que l’homme est (aussi) un loup pour l’homme, et que si nous considérons sans angélisme la société humaine dans son ensemble, nous sommes bien obligés de reconnaître que nous sommes continuellement en guerre contre nous mêmes, et que notre pire ennemi, le plus cruel de tous, c’est nous-mêmes ;

Même se je suis consciente que la société humaine s’est édifiée à travers une lutte sans merci et une compétition alimentée par les rivalités et les méfiances, où le principal but est, et a toujours été, comme dirait Thomas Hobbes, le profit, la sécurité et la réputation ;

Même si je sais qu’en temps de guerre et de crise, chacun devient l’ennemi de chacun et que chacun ne cherche in fine qu’un bouc émissaire pour exorciser ses peurs et sa frayeur ;

J’aime à penser et à croire néanmoins que le meilleur de nous-mêmes finira par triompher, en d’autres termes que la force obscure et cruelle en nous sera transmutée, transcendée en une force lumineuse, qui se nomme fraternité, solidarité, Amour !

Dernièrement, des signes avant-coureurs et à mon avis exponentiels de la recherche effrénée d’un bouc émissaire se font de plus en plus pressants… Ne serait-ce que dans le monde politique, familier de tous, un signe aisément visible en fut la cristallisation d’une forme de haine automatique envers la personne de Nicolas Sarkozy, cible expiatoire idéale. Ségolène Royal figure en bonne place à ses côtés, comme d’ailleurs dans le fameux kit des poupées vaudou, mis en vente à cet effet. Et voici maintenant le tour de Rachida Dati, dernier être humain désigné par acclamation comme bouc émissaire consensuel, élue pour être « lapidée » en place publique.

Il se trouve, pour le meilleur et pour le pire, que je suis consciente d’appartenir au genre humain, qu’à ce titre, rien de ce qui touche à un homme ne m’est étranger, et qu’il m’est donc impossible de rester indifférente.

« La première fois, dit saint Augustin, qu’on entendit prononcer à Rome ce beau vers de Térence : Homo sum, et humani nihil a me alienum puto, il s’éleva dans l’amphithéâtre un applaudissement universel ; il ne se trouva pas un seul homme dans une assemblée si nombreuse, composée de Romains et des envoyés de toutes les nations déjà soumises ou alliées à leur empire, qui ne parût sensible à ce cri de la nature. » Ce cri précurseur de l’évangile ! Aujourd’hui, hélas !, je n’entends aucun cri semblable, ou si peu, aucune parole de protestation clairement et explicitement assumée.

Et pourtant, oui, il est urgent d’établir une solidarité réciproque, fraternelle. Urgent d’apprendre à nous Aimer les uns les autres, à rechercher ce qui nous unit et pas seulement et continuellement ce qui nous divise.

Il faut que tous les hommes de bonne Volonté, au lieu de se taire par peur du ridicule ou par commodité, s’insurgent contre toute injustice, fût-elle commise envers le camp adverse ! Or une des plus grandes injustices est celle qui se traduit par la livraison d’un être humain à la vindicte publique, en lui retirant systématiquement et délibérément tous ses attributs et toutes ses qualités humaines, pour mieux justifier notre haine de l’autre et renforcer notre sentiment d’appartenir au côté des bons, des purs, des dignes.

Avec la crise financière qui ne fait que commencer et dont les conséquences seront terribles pour tous, j’ai peur, très peur de cette montée de la haine, bien visible et palpable.

Alors je vous le dis en fraternité, Madame Rachida Dati, l’homme ne pas seulement un loup pour l’homme : il en existe quelques uns qui ne craindront jamais de témoigner de leur solidarité.

Alors, comme je l’ai fait ici pour Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy — contre tant d’avis contraires et au prix de tant de protestations véhémentes ! —, je tenais à le faire également pour vous.

Bon courage, bon vent et bienvenue à votre enfant !

Humainement,
t.


David Oistrakh, Debussy – Clair de lune

Le dicible de l’indicible

La lumière parle et je l’écoute, sans plus demander si je le fais bien ou mal, la lumière parle et je l’écoute… Il me semble que brille en ce moment le dedans du dedans des choses, que le monde rayonne de sa lumière intérieure. J’écoute. Il me semble avoir retrouvé la trace du tracé oublié, l’empreinte du sacré. J’écoute…

Ce qui m’a émerveillé avant toute chose, il faut le dire en un temps qui semble voué à l’obscurité et à la prétention, c’est la simplicité extrême avec laquelle certains êtres humains ont choisi de nous transmettre leur expérience de l’indicible Ouvert. Cet « espace intérieur du monde », où « en silence l’oiseau vole au travers de nous »… Passeurs, ils nous donnent à entendre et à voir. À aucun moment ils ne se glorifient, comme s’ils pensaient que chacun peut entreprendre ce cheminement ascensionnel et qu’il n’ont à cela aucun mérite particulier. Humbles, dépouillés jusqu’à la transparence, leur corps n’a pas été, n’est pas, une prison, mais une centrale d’énergie qui les relie à la source émettrice de toute Vie !

Ce qui m’émerveille toujours, il faut le dire en un temps voué à l’arrogance et à l’éloignement, c’est l’humilité, la simplicité avec laquelle ces êtres s’accordent à la Vie.

Dans un monde qui tourne en rond, où les hommes ne s’ouvrent que sur « moi-même », dans l’ivresse de leur « toute puissance » psycho-centrique, mais ignorant tout de leur origine et de leur destinée, privés de centre et d’orientation, c’est-à-dire perdus, ces hommes-là, recueillis dans leur infinie solitude intérieure,  ont réalisé  qu’un même espace unit tous les êtres : un espace tout intérieur, un pur espace dans lequel éclosent les âmes. Un espace unique qui concilie la vie avec elle-même. L’être avec l’Être !

Ils ont compris que c’est là, dans cette intériorité profonde à la vacuité infinie, que se trouve le « Royaume de D.ieu », et que ce Royaume est celui du désarmement intérieur, celui de la Paix !

Ainsi, après avoir recueilli, ils donnent : ils se font passeurs… simples passeurs, invisibles car « méconnus ». Et veilleurs.

Et voilà pourquoi – m’ont-ils dit –  dans un monde voué à l’image et aux idoles, ils ne cherchent que l’effacement, dans un monde voué à la reconnaissance des images, à la visibilité à tout prix, eux ne cherchent que l’anonymat, l’invisibilité !

Car il s’agit pour eux d’un acte d’amour et de compassion, avec et pour soi-même, d’un acte « aux mains jointes », de la vie à la Vie !

Ô envol de tous les lieux de ma périphérie !

Amitiés d’étoiles,

t.

Jascha Heifetz plays Melodie by Gluck